1. Causes
L’environnement, l’économie et la population de la Tunisie sont fortement exposés et vulnérables aux catastrophes suite à des aléas naturels et/ou anthropiques. Les changements climatiques devraient amplifier l'exposition du pays aux risques d’inondations, de sécheresses plus fréquentes et plus sévères, et d’élévations du niveau de la mer et des submersions. Selon la base de données (DESEINVENTAR) sur les pertes liées aux catastrophes qui été mis en place par le ministère de l’environnement en 2014, le pays a été touché par près de 2 500 catastrophes au cours des 30 dernières années (1980-2013), provoquant 1 075 décès et des pertes économiques d'un montant de 756 millions d’USD. Les catastrophes ont détruit 17 821 habitations et en ont endommagé 24 728.
Consciente de ces risques naturels ainsi que d’autre risques anthropiques qui impactent la population, l’environnement et l’économie et touche directement la durabilité du développement, le Ministère de l’Environnement, point focal Sendai, a commencé à prendre des initiatives importantes depuis 2012 afin de renforcer les capacités nationales et locales pour définir les orientations stratégiques en matière de réduction de risques de catastrophes (RRC).
Toutefois, la Tunisie continue d’avoir de plus en plus de catastrophes localisées et intenses touchant son infrastructure, ses services de base et les moyens de subsistance, notamment des populations les plus vulnérables. A titre d’exemple, les inondations qu’a connu le pays en 2018 ont touché plusieurs gouvernorats du pays dont la plus frappante a été à Nabeul avec des effets (dégâts et pertes) estimés à 170 M$.
Plus récemment en 2020, la crise mondiale liée au COVID-19 a impacté davantage l’économie nationale qui devrait se contracter, selon le FMI, de 4,3% en 2020 sous l’effet de COVID représentant ainsi la récession la plus importante depuis l’indépendance et la Tunisie, a été frappée par la pandémie de COVID-19 depuis le 2 Mars 2020.
2. Contexte international
La période de 1990 à 1999, désignée Décennie Internationale de la Prévention des Catastrophes Naturelles (DIPCN), avait pour objectif majeur de contribuer à un niveau mondial à un effort constant de prévention des catastrophes naturelles.
Les États Membres de l’ONU réunis à Yokohama au Japon en mai 1994 à l’occasion de la Première Conférence Mondiale sur la Prévention des Catastrophes Naturelles dans le cadre de la DIPCN, ont adopté la Stratégie et le Plan d’action de Yokohama pour un monde plus sûr au XXIème siècle. Des organisations non-gouvernementales et d’autres internationales, mais aussi des représentants des milieux d’affaires, du secteur privé et des médias, de la communauté scientifique, y ont également contribué.
Les mesures adoptées dans cette stratégie ont conduit en 2000 à la création de la Stratégie Internationale de l’Organisation des Nations Unies pour la Prévention des Catastrophes (ONU/SIPC) Cette même vision et les objectifs fixés pour la stratégie ont fait partie des travaux des Objectifs du Millénaire pour le Développement en 2000, et ceux du Sommet Mondial pour le Développement Durable tenu en 2002.
La 2ème Conférence Mondiale sur la Prévention des Catastrophes (CMPC-II), en janvier 2005 à Kobé-Hyogo au Japon, a été couronnée par la Déclaration et le Cadre d'Action de Hyogo (CAH) 2005-2015 ‘’Pour des nations et des collectivités résilientes face aux catastrophes’’ qui était conçu pour donner un élan :
- au travail mondial d'application du Cadre international d'action pour la Décennie internationale pour la prévention des catastrophes naturelles de 1989,
- aux « Stratégie et plan de Yokohama pour un monde plus sûr : directives pour la prévention des catastrophes naturelles, la préparation aux catastrophes et l'atténuation de leurs effets » de 1994,
- et à la Stratégie internationale de prévention des catastrophes de 1999.
Lors de la 2ème conférence, cinq priorités furent arrêtées quant aux défis à relever durant la décennie 2005-2015 :
- Priorité 1 : Eriger la réduction des risques en priorité ;
- Priorité 2 : Identifier les risques et passer à l’action ;
- Priorité 3 : Instaurer une compréhension et une conscience du risque ;
- Priorité 4 : Réduire les risques ;
- Priorité 5 : Se préparer et se tenir prêt à agir.
Le Cadre de Sendai 2015-2030 qui succède au Cadre d’Action de Hyogo, a été adopté lors de la 3ème Conférence Mondiale des Nations Unies sur la réduction des risques de catastrophe à Sendai, au Japon, le 18 mars 2015. Le cadre inter-pays de Sendai définit sept objectifs et quatre priorités d'action pour prévenir et réduire les impacts des risques de catastrophe potentielles :
- Analyser et comprendre le risque de catastrophe,
- renforcer la gouvernance des risques de catastrophe pour gérer ce type de risques,
- investir pour maitriser et réduire des catastrophes en vue de renforcer la résilience de l’habitat, des populations, des économies, …,
- et aider à améliorer les situations pour mieux se préparer aux catastrophes, pour répondre efficacement à leurs survenue et impacts subséquents, et pour "reconstruire au mieux" dans les domaines du rétablissement, de la réhabilitation et de la reconstruction.
Le but ultime du Cadre de Sendai 2015-2030 est de prévenir et de réduire au plus et au mieux les risques de catastrophe, notamment les pertes de vies humaines, de moyens de subsistance et de santé, et celles d’actifs économiques, physiques, sociaux, culturels et environnementaux des personnes, des entreprises, des communautés et des pays au cours des 15 prochaines années. Sept objectifs mondiaux du Cadre de Sendai ont été fixés, pour la RRC à l’horizon 2030.
- Réduire les taux de mortalité DUE aux catastrophes ;
- Réduire nettement le nombre de personnes touchées par des catastrophes et donc les taux correspondants, partout dans le monde ;
- Réduire, les pertes économiques directes dues aux catastrophes en proportion du produit intérieur brut (PIB) des pays.
- Réduire nettement la perturbation des services de base et les dommages causés par les catastrophes aux infrastructures essentielles en renforçant leur résilience, notamment les établissements de santé ou d’enseignement,
- Augmenter nettement le nombre de pays dotés de stratégies nationales et locales RRC.
- Améliorer la coopération internationale avec les pays en développement en leur fournissant un appui approprié et continu pour la mise en œuvre du Cadre de Sendai.
- Améliorer l’accès des populations aux dispositifs d’alerte rapide multirisque et aux informations et évaluations relatives à la RRC.
La gouvernance et la lutte pour la RRC implique l‘évaluation et la gestion des facteurs, et la compréhension des causes de ces risques, en limitant l’exposition des communautés, et en agissant pour réduire la vulnérabilité de personnes et des actifs, notamment par une gestion rationnelle de l’espace, des éléments structurants, et de l’environnement, et une meilleure organisation pour faire face aux événements indésirables.
Le Cadre de Sendai (2015-2030), engage tous les acteurs de premier plan au développement et à l’aide humanitaire, au plan multisectoriel, à investir dans la RRC, pour renforcer la résilience des communautés aux événements de catastrophes.
3 . Etat de lieu (contexte national)
Compte tenu de sa situation géographique et de son climat, la Tunisie est confrontée à une multitude de risques de catastrophes qui varient selon les régions. En effet, si en zone urbanisée, le long de la côte méditerranéenne, le risque d'inondation est la prédominance majeure, les feux de forêt peuvent sévir au Nord et au Centre-ouest, et vers le Sud plus aride, la sécheresse représente le plus grand risque. Par ailleurs, le risque de tremblements de terre se justifie par des événements historiques d’une magnitude de 4 à 6 Richter (intensité V à IX ; échelle internationale Mercalli 1931 modifiée).
C’est dans ce contexte qu’en 2019, l’Index international INFORM5 qui permet de classer les pays selon leurs niveaux d’exposition aux risques et leurs échelles de vulnérabilité (notée de 0 à 10) délivre à la Tunisie un score de 3,2. Le même rapport en 2019, relève que face à l’exposition aux risques mentionnés plus haut, le pays est aussi caractérisé par sa vulnérabilité pour faire face aux phénomènes extrêmes liés entre autres à des carences structurelles, institutionnelles et infrastructurelles.
Les données nationales indiquent que près de 2500 catastrophes ont survenu en Tunisie au cours des 30 dernières années (1980-2013), provoquant 1 075 décès et des pertes économiques d'un montant de 756 millions $USD (PDNA, 2018).
Pour inverser cette tendance involutive dans ce contexte marqué, entre autres, par de profonds changements sociaux et politiques qui ont suivi la révolution de 2011, les autorités tunisiennes s'efforcent d’accroître la résilience des populations et des institutions face aux risques de catastrophes d'origine naturelle et anthropique/technologique.
4. Objectifs stratégiques : stratégie nationale
En vue de dresser une meilleure cohérence entre les initiatives prises pour la RRC, la Tunisie a besoin d’élaborer une Stratégie Nationale de Réduction des Risques de Catastrophes qui permet à partir d’un diagnostic exhaustif et actuel du contexte national de RRC, de définir une vision pays sur la question, d’élaborer des axes stratégiques et des actions à conduire dans le court, le moyen et long terme ainsi qu’un plan d’action y relatif. Cette stratégie aura pour objectifs :
- à l’échelle national : d’ériger la problématique centrée sur la RRC en priorité nationale, multisectorielle et pluridisciplinaire intégrant la diversité d’acteurs concernés (Etat, société civile, acteurs décentralisés, partenaires techniques et financiers, recherche-développement, secteur privé, etc.).
- à l’échelle international : de répondre à l’une des recommandations majeures de la résolution 2006/63 du Conseil Economique et Social des Nations Unies. Cette même recommandation figure dans les résolutions 56/195, 58/214 et 58/215 de l’Assemblée Générale des Nations Unies. De plus, atteindre le cinquième objectif du cadre de Sendai qui indique qu’il faut « Augmenter substantiellement le nombre de pays ayant une stratégie nationale de RRC ainsi que des programmes locaux de réduction des risques de catastrophe ».